DÉPRESSION

QU’EST-CE QU’UNE DÉPRESSION ?

Une dépression est une maladie dont les deux principales caractéristiques sont :

  • une humeur sombre et dépressive, se sentir désœuvré ;
  • une perte d’intérêt et de plaisir, ne plus pouvoir être content.

En outre, pour pouvoir parler d’une dépression, plusieurs symptômes ou plaintes parmi les sept énoncés ci-après doivent être présents sur une plus longue période :

  • sentiment d’inutilité ou de culpabilité ;
  • troubles du sommeil ;
  • diminution de l’appétit ou appétit grandissant ou changements de poids marqués ;
  • peu d’énergie ou fatigue ;
  • problèmes de concentration ou indécision ;
  • lenteur ou, justement le contraire, agitation physique permanente ;
  • pensées récurrentes sur la mort ou le suicide.

Si vous reconnaissez plusieurs de ces symptômes, en plus d’une des deux principales caractéristiques et s’ils persistent au moins deux semaines, il peut être question de dépression.

Top

PRÉVALENCE

Selon des estimations, 9 % de la population belge totale est tôt ou tard en proie à une dépression. En Belgique, 4,1 % des hommes et 6,8 % des femmes font face à une dépression.

Top

QUELLES SONT LES CAUSES POSSIBLES ?

Une dépression peut avoir de nombreuses causes, qui n’ont pas encore été listées tout à fait précisément.

Des indications montrent la possibilité de causes génétiques dans certains types de dépression.

En outre, il existe encore d’autres facteurs déjà connus qui augmentent la prédisposition à une dépression.

Les hommes et les femmes qui font des heures supplémentaires présentent un risque plus élevé d’angoisses et de dépression, ce risque atteint son maximum si les prestations égalent ou dépassent 49 heures par semaine. Selon une enquête norvégienne réalisée par l’université de Bergen en 1999, le risque est 3,5 % plus élevé chez les hommes et 4 % chez les femmes. Un stress prolongé peut également contribuer au développement d’une dépression.

Les femmes sont plus susceptibles de faire une dépression que les hommes, ce qui pourrait s’expliquer par la régulation hormonale. Les personnes seules sont également plus sensibles que les personnes en couple.

Des maladies telles que le cancer, le diabète ou la démence, sont aussi des facteurs à risque. Attention, une dépression tardive peut à son tour être le symptôme d’un début de démence. 20 à 25 % des personnes présentant des pathologies médicales générales (diabète, infarctus, carcinomes, pathologies cérébro-vasculaires) peuvent développer un trouble dépressif en même temps que leur pathologie.

Les personnes qui ont un problème d’alcoolisme présenteront deux à trois fois plus de troubles anxieux ou dépressifs.

Les problèmes financiers, le chômage, le manque de réseau social et une formation plus faible constituent également des facteurs augmentant le risque d’avoir une dépression.

Enfin, deux types de caractères opposés pourraient accroître le risque de dépression. Le premier est la « sociotropie », une sorte d’hypersociabilité. Les personnes qui fonctionnent de cette manière sont extrêmement dépendantes de leur entourage. Elles attendent continuellement soutien et approbation.
Le second type de caractère est l’autonomie affective excessive. Ces personnes sont extrêmement indépendantes, à la fois dans ce qu’elles font, mais aussi dans leur vie sentimentale. Elles s’imposent des objectifs sans les partager avec d’autres et elles sont particulièrement attachées à leur autonomie. Elles sont véritablement obsédées par le contrôle parce qu’elles ne veulent absolument pas devenir dépendantes de quelqu’un.

Top

QUELS SONT LES SIGNAUX ?

Les signaux sont les suivants : humeur sombre, indifférence, fait de vivre sans plaisir, pensées relatives à la mort, troubles du sommeil, modification de l’appétit, variation de poids, sentiment d’infériorité, sentiment de culpabilité, ralentissement psychomoteur, fatigue, diminution de la capacité de réflexion et de concentration. En cas de dépression, on se sent le plus mal le matin tandis qu’en cas de burn-out on se sent le plus mal le soir.

Top

QUELS SONT LES PIÈGES POUR LES MÉDECINS ?

En général
De nombreux symptômes de la dépression peuvent cacher d’autres problématiques (p. ex. burn-out, fatigue générale, etc.) d’où l’importance d’un diagnostic différentiel. Les problèmes les plus fréquents sont la méconnaissance de la dépression et la stigmatisation de la santé mentale.

Spécifiquement pour les médecins
Les médecins ont souvent tendance à s’auto-diagnostiquer : ils risquent donc de se heurter à leurs failles ou de minimaliser la problématique. Poser un diagnostic différentiel est toutefois important et un confrère est souvent mieux placé pour établir le diagnostic d’un médecin que ce médecin lui-même.

Une dépression est encore trop souvent considérée comme une faiblesse que le médecin préfère dissimuler à ses confrères par crainte de stigmatisation. Cependant, la dépression est une maladie qui, comme toute autre maladie, peut toucher tout le monde.

Top

COMMENT PEUT-ON ÉVITER UNE DÉPRESSION ?

Adopter un style de vie sain, trouver un bon équilibre privé-professionnel, éviter de s’exposer à un stress prolongé et faire suffisamment de sport diminuent le risque de sombrer dans une dépression ; néanmoins, il est impossible d’éviter une dépression, comme on ne peut le faire avec d’autres maladies.

Top

QUELLES SONT LES CONSÉQUENCES ?

Il est essentiel de traiter une dépression. Cette pathologie a de lourdes conséquences, souvent catastrophiques, pour la vie sociale, familiale et personnelle de l’individu. Une dépression qui n’est pas traitée peut avoir pour conséquences des difficultés sur le plan professionnel, l’absentéisme et des problèmes relationnels et familiaux. Le risque de suicide augmente également fortement. Dans 1 cas sur 15, une dépression sévère mène à un suicide. Plus l’intervention est rapide, plus il est facile de se remettre d’une dépression.

De plus, une dépression conduit souvent à un abus de substances (drogues, alcool, benzodiazépines, etc.)
Plus de 50 % des personnes dépressives présentent des troubles anxieux additionnels.

Top

QUELS SONT LES PLANS DE TRAITEMENT POSSIBLES QUAND ON SOUFFRE D’UNE DÉPRESSION ?

Plus de 70 % des patients obtiennent rapidement des résultats grâce aux médicaments (antidépresseurs, principalement des inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine ou ISRS) et à l’accompagnement psychologique ou à la psychothérapie. Les médicaments sont souvent nécessaires pour remédier aux troubles physiologiques et créer ainsi une base pour un traitement psychothérapeutique. Parallèlement, il est primordial d’être à l’écoute du patient, d’où l’importance de prendre contact avec un confrère si l’on constate des signes de dépression chez soi.

Un épisode dépressif qui n’est pas traité dure habituellement six mois ou plus. Si la dépression dépasse six mois, les chances de rétablissement sont beaucoup plus faibles. Un traitement est donc nécessaire car la dépression peut sinon s’aggraver, voire devenir chronique.

Directives générales :

  • essayez de voir si votre dépression est une réaction liée à un événement ou à un problème ;
  • vérifiez si vous pouvez parler de vos sentiments et éventuels problèmes avec une personne de votre entourage ;
  • essayez d’accepter l’idée que vous avez une dépression, soyez patient et prenez le temps ;
  • allez dormir à une heure normale, mais levez-vous également à une heure normale ;
  • distrayez-vous avec des activités que vous trouvez relaxantes ;
  • restez socialement actif, ne vous isolez pas ;
  • n’allez pas en vacances si vous ne pouvez pas en profiter ;
  • sachez qu’une activité physique telle que la marche, le vélo ou la natation a un effet salvateur ;
  • attendez avant de prendre des décisions qui auront des conséquences extrêmes ;
  • ne cherchez pas le réconfort dans l’alcool ou les drogues.

Luminothérapie
Actuellement, la luminothérapie est le traitement préférentiel pour les formes de dépression saisonnière.

Psychothérapie
L’aspect psychothérapeutique peut suffire si la dépression est d’intensité légère à modérée ou si les facteurs psychologiques jouent un rôle essentiel.

Trois formes de psychothérapie ont déjà prouvé leur efficacité pour le traitement des dépressions :

  • thérapie cognitive et comportementale : cette méthode agit sur les pensées négatives et les distorsions cognitives et tente de les transformer en pensées utiles et positives ;
  • psychothérapie interpersonnelle : cette méthode se concentre sur le rôle fondamental d’une intégration harmonieuse de l’individu dans son environnement, où l’on accorde de l’importance aux aptitudes relationnelles du patient ;
  • thérapie psychodynamique : cette méthode considère l’épisode dépressif comme une régression liée à des conflits inconscients datant de l’enfance qui n’ont pas encore été résolus.

On constate de plus en plus fréquemment la mise en œuvre de combinaisons des thérapies ci-dessus, outre les autres méthodes thérapeutiques.

Le premier et principal conseil en cas de (soupçon d’une) dépression est de consulter un confrère médecin qui a une expérience du phénomène. À cette fin, vous pouvez également faire appel aux médecins de confiance de MÉDECINS EN DIFFICULTÉ. Un autre médecin :

  • analysera plus objectivement les faits, pour que vous ne vous empêtriez pas dans vos « failles » ;
  • peut examiner avec vous la façon dont vos confrères peuvent prendre en charge vos patients en cas d’incapacité de travail ;
  • peut étudier avec vous les mesures structurelles qui peuvent être prises dans le domaine du travail pour le rendre de nouveau supportable et faisable ;
  • est une oreille attentive et peut vous encadrer jusqu’à la reprise du travail ;
  • peut éventuellement vous orienter vers d’autres dispensateurs de soins spécialisés (psychologues, etc.).

L’accompagnement personnel en cas de dépression, tout comme pour un burn-out, doit être établi en fonction de l’intéressé. En effet, le processus de récupération d’une dépression est un processus intensif de conscientisation, d’individualisation et de croissance, extrêmement personnel. Ce rétablissement nécessite une approche et un accompagnement intégraux harmonisés au client et à son entourage, dont le déroulement et les points d’attention peuvent varier d’une personne à l’autre. S’arrêter sur ce qui donne sens et (re)trouver l’espoir sont les principaux piliers du trajet d’accompagnement.

Pour les dépressions sévères, il est conseillé de lancer d’abord un traitement médicamenteux composé d’antidépresseurs qui doit permettre au patient d’être de nouveau capable de travailler sur l’aspect cognitif.

L’accompagnement personnel en cas de dépression peut par exemple se présenter comme suit :

      • a) Récupération physique : retrouver de l’énergie
        • Repos : la récupération s’effectue parce que les glandes surrénales sécrètent de la DHEA (déhydroépiandrostérone) qui nettoie pour ainsi dire les déchets engendrés par le stress. Intégrer consciemment des moments de récupération en intercalant régulièrement des pauses contribue à réduire le niveau de stress. Les exercices de respiration de « cohérence cardiaque » produisent le même effet.
        • Activité quotidienne à l’extérieur se renforçant lentement et des exercices de détente physique
          Il est en effet primordial de pratiquer une activité qui vous convienne. Si c’est possible, allez marcher à l’extérieur : l’air et les rayons du soleil, même si le soleil ne brille pas, peuvent vous aider à récupérer d’une dépression.
        • Trame jour/nuit fixe
        • Soins personnels : manger suffisamment et sainement, avoir des habitudes saines en matière de sommeil, etc.
        • Faire des activités génératrices d’énergie et ne pas s’épuiser davantage sur le plan mental
        • Prévoir de l’aide supplémentaire dans son ménage
      • b) Rétablissement cognitif :
        • S’occuper de façon créative : bricoler, dessiner, colorier, peindre, faire de la poterie, tricoter, etc. Ces activités touchent l’hémisphère droit de notre cerveau et déchargent ainsi l’hémisphère gauche surchargé.
        • Psychoéducation : les personnes qui se plaignent à cause du stress trouvent souvent leur compte dans la psychoéducation qui leur permet de comprendre leurs problèmes, mais surtout qui leur donne une idée de la façon dont elles peuvent aborder leur situation pour retrouver le contrôle et leur prise sur leur vie
        • (auto)acceptation et indulgence : pleine conscience et autres exercices de relaxation mentale
        • Recadrer les pensées inutiles et les remplacer par des pensées positives constructives
        • Mindfulness : être « ici et maintenant », apprendre à accepter les émotions difficiles comme une partie de la vie sans juger
        • Dresser la liste des qualités principales du médecin, en tant qu’humain et que professionnel
      • c) Changement de comportement

Inviter et stimuler le médecin à examiner comment il envisage la situation quand ses problèmes seront résolus et analyser la situation actuelle pour déterminer s’il existe des moments qui ressemblent, même légèrement, à la situation désirée. Ensuite, il convient d’étendre ce comportement efficace et d’apprendre à l’appliquer plus souvent. Dans cette optique, les mesures suivantes peuvent être adoptées :

          • Apprendre à (re)connaître ses propres limites et y veiller ; apprendre à dire « non »
          • Apprendre l’auto-respect
          • Réexaminer ses valeurs, objectifs de vie et priorités pour parvenir à un changement de comportement
          • Réorientation (partielle) de l’activité professionnelle en fonction des objectifs de vie définis comme étant essentiels.
        • d) Nouvelle analyse du système social

Un médecin ne travaille pas sur une île, mais au sein d’un système social composé d’une famille, d’amis, de confrères, de patients, etc. On examine les adaptations nécessaires au sein du système social et les zones où se trouvent les ressources dans ce système. L’objectif est d’aspirer à un autre équilibre avec son environnement.

        • Fixer une nouvelle approche, organisation et des nouvelles heures d’ouverture avant de recommencer à travailler. Reprendre dans un cadre qui est exactement le même que celui dans lequel on a été malade peut uniquement mener tôt ou tard à une rechute.
        • Analyser l’organisation de travail avec l’aide de tiers/de confrères/du département des ressources humaines pour en augmenter l’efficacité et mettre en œuvre les adaptations nécessaires
        • Réexaminer la façon de travailler/de communiquer au sein de l’équipe (département, pratique de groupe, cercle de garde, etc.)
        • Occuper le temps récupéré avec des activités génératrices d’énergie
      • e) Réintégration après un rétablissement physique et mental suffisant ; uniquement si vous VOUS sentez complètement prêt, donc pas en raison de la pression exercée par les circonstances, les patients, les confrères, les amis et la famille, etc.
        • Se reconstruire lentement, surveiller ses limites et les nouveaux signaux d’une dépression !!!
        • (re)prendre contact avec les confrères et aborder la réintégration : examiner les possibilités de collaboration et voir de quelle manière et à quel rythme les dossiers/patients peuvent de nouveau être assumés
        • Dresser une liste des facteurs à risque et des signaux et envisager une façon de procéder si des signaux émergent de nouveau. Il convient aussi de continuer le suivi/l’accompagnement par une personne de confiance après que tout est de nouveau en bonne voie et que l’on se sent « libéré » de la dépression
        • Suivre des formations complémentaires de soutien/réorientation

L’ECT, dernier remède possible
Si différentes possibilités de traitement ont été tentées sans donner suffisamment de résultats, il est possible d’opter, en concertation avec votre dispensateur de soins, pour l’ECT, l’abréviation de « électroconvulsivothérapie ». Cette méthode est appliquée si différents médicaments ont été essayés et s’ils n’ont pas suffisamment bien fonctionné. L’électroconvulsivothérapie peut également être envisagée en cas de dépressions très sévères, potentiellement mortelles (pensées suicidaires ou négligence grave). L’ECT est pratiquée sous anesthésie et ne peut être réalisée que par un psychiatre exerçant dans une institution ayant une expérience suffisante de la pratique des ECT.

Notons qu’il est parfois nécessaire, avant l’ECT, d’hospitaliser la personne dans un service spécialisé, ce qui permet de combiner de façon intensive repos, protection, traitement médicamenteux et psychothérapeutique, voire l’ECT.

Top

Contact

MÉDECINS EN DIFFICULTÉ est un point de contact central pour les médecins qui luttent contre des problèmes de santé psychique. Les médecins ou une personne de leur entourage peuvent prendre contact avec le chargé de mission du projet MÉDECINS EN DIFFICULTÉ.